Imprimer cette fenêtreRetour page précédente Le froid, la neige, le givre...

Les trains roulent bien sûr par tous les temps, et cela paraît tout à fait naturel. Pourtant, vous avez pu être témoins, ou entendre parler, d'incidents graves occasionnant des retards importants pendant certains jours d'hiver.
Les causes de ces problèmes ne sont pas évidentes pour tout le monde, puisqu'il paraît tout à fait simple de faire rouler une roue sur un rail, cette technologie apparaissant sans risques de dérapages comme sur le circuit routier.
Le Train Jaune en Cerdagne Or, je l'ai déjà dit, la sécurité du chemin de fer est basée en partie sur la capacité des trains à s'arrêter, et non pas à rouler. Voici déjà un point qui doit vous apparaître moins évident. Ensuite, pour rouler, encore faut-il être sûr de son itinéraire, tracé par des aiguillages qui peuvent être encombrés de neige ou de glace ! Enfin, sur les trains à traction électrique, il faut capter du courant, beaucoup de courant, et c'est impossible de le faire sur des caténaires givrées, lorsque le pantographe ne peut plus toucher la fil de contact.
Je vous retrace, ici, succintement, les différentes causes pouvant amener des problèmes sérieux, et les solutions adoptées les plus courantes.

La neige
La neige a une caractéristique connue de tous. Elle se tasse facilement en blocs compacts, qui deviennent très durs. Cette caractéristique est de nature à empécher le fonctionnement normal des systèmes mécaniques, lorsque la neige s'entasse dans des logements réservés habituellement au fonctionnement. Cette neige est particulièrement génante dans les aiguillages et dans les timoneries de frein. Dans les aiguillages, les lames mobiles ne peuvent plus "coller" sur le rail lorsque la neige s'entasse entre les deux parties, et les aiguilleurs ne reçoivent plus leurs confirmations d'insertion.
Cette anomalie oblige à une vérification manuelle, et prends du temps. Les aiguillages ne sont pas à portée de main de l'agent qui les commande, et il faut bien sûr appliquer tout un système de procédures pour obtenir une certitude.

Pour éviter ce problème, sur les grandes lignes, les aiguillages sont chauffés sur toute la longueur utile, par des dispositifs fixes. Lorsque ce n'est pas possible, ce sont des agents qui s'occupent de maintenir ces aiguillages en fonctionnement normal, en chauffant et en nettoyant les parties sensibles.
Pour les timoneries de freinage, sur des véhicules qui roulent, il n'est évidemment pas possible de chauffer ou de nettoyer cette neige. Le conducteur suivra un ensemble de réglements, en faisant manoeuvrer ces timoneries à intervalles réguliers, par freinage. La chaleur dégagée, et ces mouvements réguliers, empècheront la neige de s'entasser là où il ne faut pas.

Sur les trains à grande vitesse, et particulièrement sur les TGV, ces blocs de neige compactée, qui s'entasse sous les caisses, présentent un danger potentiel sérieux. Lorsqu'il fait moins cinq degrés, imaginez la température sous des caisses de TGV, avec un vent de 300 km/h incessant. La neige devient dure comme du béton ! Je pense ne pas avoir besoin de préciser le danger que représente un tel bloc en se détachant.
C'est une des causes qui obligent à réduire les vitesses, occasionnant des retards, et bien sûr, des mécontentements.

Le givre
Le givre présente d'autres inconvénients, notamment pour les circulations électriques. Lorsqu'on parle de givre, on pense généralement à une petite couche de glace qui se désagrège à la moindre action. La réalité est un peu différente, car le givre a la caractéristique de s'infiltrer dans les moindres endroits en provoquant le blocage de systèmes délicats, comme la serrure de votre voiture, par exemple. Au chemin de fer, le givre pose un problème pour le captage du courant. La pellicule qui se forme sur la caténaire empèche le pantographe de coller correctement, et peut provoquer l'apparition d'arcs importants qui risquent de couper le fil de contact. Le conducteur suivra, comme toujours, les prescriptions qui lui incombent dans l'utilisation de son matériel dans ce cas précis.
Sur certaines zones, des installations fixes automatiques signalent au mécanicien la présence de givre, ce qui lui impose de mettre en oeuvre la réglementation correspondante.

Mais le problème devient beaucoup plus aigu lorsqu'il se produit des pluies verglaçantes. Dans ce cas, tout est englué dans une gangue de glace, bloquant irrémédiablement tous les systèmes sans protection. Une machine électrique qui s'arrète en pleine voie par ce temps risque fort de voir son pantographe solidarisé à la caténaire par la glace, et elle ne peut plus bouger sans risquer d'arracher toutes les installations. Ce genre de problème survenant surtout la nuit, vous pouvez imaginer sans peine les conséquences lorsque des trains sont obligés de stopper en rase campagne, en s'entassant à la queue leu-leu ! Sans oublier l'absence possible de chauffage sur les trains de voyageurs, qui tournera très vite à la révolte, si aucune solution n'est apportée très rapidement !

Vous vous doutez bien que de telles situations sont rares ! Mais elles provoquent des retards importants pouvant aller jusqu'à plusieurs heures, ce qui réjouira toujours certains journalistes, qui y verront seulement l'occasion de taper sur les cheminots ! J'ai toujours été admiratif devant ces gens, se levant de leur plumard bien chaud, et jugeant avec hauteur ce qu'ont fait d'autres hommes, la nuit d'avant, dans le froid et la tourmente! Chapeau !

Les services électriques ne restent pas les bras croisés, en prévision de telles situations. Plusieurs dispositifs sont en place pour éviter le givrage des caténaires. Par exemple, en l'absence de train qui absorberait de l'intensité, on forcera le passage de courant dans des résistances, de telle sorte que les zones à risque soient toujours en débit de courant, ce qui provoque un dégagement de chaleur dans la caténaire.
On peut également avoir recours à une circulation de machines "gratteuses" qui empèchent la formation de glace par le passage de plusieurs pantographes.
Vous voyez donc que des gros problèmes existent, et qu'ils sont traités. Mais naturellement, la prévision et le traitement de ces risques climatiques coûte beaucoup d'argent, et le problème reste entier. Les gestionnaires hésitent à engager des sommes astronomiques pour réduire des situations qui risquent de se produire très rarement, ce qui peut aisément se comprendre.
Car il ne faut tout de même pas oublier que ces sommes astronomiques risquent de figurer en partie sur votre billet, ce qui, en fin de compte, ne vous plaira pas plus que les retards !