Imprimer cette fenêtre Un service public ?
Oh, la bonne question !
Les Chemins de Fer Français sont devenus un service public à la naissance de la SNCF, lorsque les compagnies de l'époque ont été fondues en une seule société. Placée sous la tutelle du ministère des transports, cette société a assuré ce service tant bien que mal jusqu'à sa transformation en EPIC, qui est un Etablissement Public, Industriel et Commercial.
Tout ceci, me direz-vous, est purement philosophique. Ce n'est pas mon avis, car le mot "Commercial" n'est pas dénué de sens ! Qui peut faire du commerce, sans faire de bénéfices ? Et le mot "bénéfice", c'est le mot qui tue ! La SNCF contient toute sa contradiction dans son titre "EPIC", car PUBLIC n'est pas compatible avec BENEFICE !
Qu'est-ce donc qu'un service public ?
Un service public est un service établi pour le bien de la communauté. Les plus riches payent pour les plus pauvres, et dans le cas des chemins de fer, les lignes rentables doivent compenser celles qui ne le sont pas. C'est très beau quand on le dit, mais ce n'est pas ce que l'on fait !
J'ai souvent entendu dire dans ma carrière que si les chemins de fer appartenaient au privé, on verrait autre chose ! Pour sûr, je sais très bien ce qu'on verrait ! Un bon nombre de gens ne verraient d'ailleurs plus rien du tout, car le privé ne s'encombrerait pas des petites lignes de campagne.

Le spectre de la privatisation
Voyons donc ce qui se passerait, et schématisons. La SNCF serait partagée en lots, mis sur le marché. Les activités les plus rentables comme les TGV seront acquises immédiatement, cela ne fait aucun doute. Mais les acheteurs multiplieront immédiatement les bénéfices en tirant sur tout ce qui bouge, la maintenance, la sécurité, le personnel, les formations. Ceci n'est pas discutable, c'est ce qui se passe partout ailleurs, et les trains n'y feraient pas exception ! Le reste des services sera éparpillé, tout au moins pour ceux qui ont une chance de gagner de l'argent, et bien sûr, ces services ne bénéficiant plus de l'apport des grands, il vireront très vite vers le bas. Personnel non qualifié, pas d'entretien, etc... Le reste, non rentable, restera dans la mains de la SNCF qui coulera corps et biens, faute de combattants.
Ce qui se passera
Pour les grandes lignes, les petites gares et les petits trains disparaitront. Il ne subsistera à terme qu'un faisceau de grands axes, et vous devrez vous rendre au point d'accès le plus proche en utilisant le car, ou votre voiture. Comme l'avion ! Il y aura peut-être un avantage, c'est que le prix du billet sera ouvert à la concurrence, et que vous pourrez peut-être en discuter le prix. Par contre, si vous n'êtes pas en règle, vous aurez toutes les chances de vous trouver face à face avec des gros bras, qui vous feront peut-être regretter les contrôleurs de la SNCF ! On vous présentera ces nouvelles entreprises comme des modèles, en précisant qu'on a bien fait ! On évitera bien sûr de vous parler de tout ce qui a disparu , des conditions sociales dégradées et des salaires minables ! Au diable la campagne !
J'ai évidemment tort, et mon raisonnement est faux !
Vous n'en croyez pas un mot ! C'est normal, car vous avez les yeux fermés. Ouvrez-les ! Regardez ce qui se passe chez les transporteurs routiers. C'est ça que vous voulez ?
L'exemple n'est pas applicable aux chemins de fer, dites-vous ? Alors là, vous rêvez ! Car ce que je viens de décrire plus haut, c'est ni plus ni moins ce qui s'est passé chez nos voisins anglais ces dernières années. Voisins anglais qui commencent pour beaucoup à penser qu'ils se sont fait avoir par le chant des sirènes , au vu des derniers évènements tragiques.

Ce que fait la SNCF
Coincée entre deux étiquettes, la SNCF essaie de maintenir tant bien que mal un service public, en essayant de le rentabiliser, ce qui est un compromis impossible. Comme dans tout compromis, rien ne sera jamais parfait. Les régions ont été invitées à participer pour maintenir les petites lignes (les TER), mais certaines se font tirer l'oreille.
Le ferroutage est très actuel, en ce moment. Mettre les camions longs parcours sur des trains est un serpent de mer, qui a bien trop d'opposants pour aboutir efficacement. D'ailleurs, dans ce cas précis, l'attitude de certains grands décideurs du chemin de fer laisse rêveur ! Il ne faut tout de même pas oublier que la SNCF est aussi l'un des plus gros transporteurs routiers !
Dans notre pays, un tel système ne pourrait être imposé que par la loi, et non par la logique. Trop d'intérêts financiers sont en jeu et le lobby routier est très puissant. Les grands cadres de la SNCF devraient se battre avec acharnement pour çà, car les arguments ne manquent pas ! Se battent-ils ?
La seule logique dans tout ceci est l'argent ! Le fric est-il si important qu'il faut tout détruire en son nom ?
Je ne sais pas.
Mais l'important, c'est que votre train roule, n'est-ce pas ! Qu'importe la façon !
Réfléchissez ! Si vous avez des enfants, réfléchissez bien ! Etes vous bien sûr que ça suffit ?